CONSULTATIONS des PARISIENS
Jean la Quintinie
Histoire vraie
Il y a quelques années, en 1999, Mr T..., Maire de la Ville de Paris, a lancé une consultation auprès des parisiens : entre autres sujets abordés : « parlez nous de votre rue ». Super, me suis-je dis, quelle bonne idée, ce n’est pas tous les jours que nos politiciens se soucient de notre avis.
Alors, sur les marchés, dans les Mairies, sur les trottoirs, j’ai vu des tréteaux fleurir, installés pour le confort des écrivains. Les fonctionnaires de la Ville de Paris, ravis de prendre l’air, ont interpellés le passant :
« Madame un petit mot, SVP, votre rue vous y êtes très souvent, ne voulez-vous pas qu’on y apporte une amélioration ? Ecrivez, prenez votre temps. »
Ma grande naïveté « n’y a vu que du feu », et bien appliquée, j’ai fait part d’un projet qui me tenait à cœur depuis longtemps. J’ai écris :
« Peu de gens savent qui était Mr Jean De la Quintinie, Directeur de tous les jardins fruitiers et potagers du Roi Soleil à Versailles. Si, sur cette rue on pouvait supprimer le stationnement, planter des arbres, installer des jardinières fleuries, les passants, étonnés de découvrir une rue hors du commun se poseraient des questions : pourquoi ce décor, toutes ces fleurs colorées ? Ces jolies plantes vertes ? Que s’est-il passé ici ? Ce serait l’occasion d’instruire les enfants, cette rue est un passage obligé pour les écoliers du grand Groupe Scolaire Corbon. Et honnêtement, ma rue étant petite, 40 numéros environ, les dépenses ne seraient pas somptuaires. »
L'enfer de l’attente a commencé pour moi. J’ai guetté par la fenêtre un début de chantier, des marteaux piqueurs, des camions de terre fraiche ; je me suis levée brusquement dans la nuit croyant sentir l’odeur des orangers ou des pommiers en fleurs, mais rien, le matin au réveil ma rue était désespérément banale.
Après un certain temps, surprise, je reçois une lettre de la ville de Paris ; Mr T ..., Maire, invitent les parisiens à se rendre à la Mairie : Salle de Réception décorée.
Un discours, considérations générales, (je n’ai rien retenu, mon impatience était grande d’avoir enfin l’annonce du début des travaux), on distribue à chaque personne présente un bouquin énorme, un pavé. Vous vous en doutez, j’ai cherché mon nom avec une grande ferveur. Tout était répertorié, tous les arrondissements, nos souhaits fidèlement reportés.
Hélas, aucune suite à ce branle bas de combat... que d’espoirs déçus.
En rentrant à la maison, le bouquin sous le bras , j’ai pensé : « Ah, les hommes politiques, que de promesses non tenues; pourquoi avoir consulté tant de monde, tout Paris était concerné, tous les arrondissements, pour un classement sans suite ».
Et comme je suis une grande nostalgique, quand je regarde par la fenêtre, mon imagination fait naître des arbres majestueux, des compositions magnifiques, des arbres fruitiers. Hélas, dans ma rue, du goudron, des corbeilles à papier.
C’est dur de subir une telle déception !
Après réflexions, je crois que l’engouement pour les fleurs, dans les rues me vient, d’une découverte, il ya quelques années, de la ville de Cabourg en Normandie.
Au printemps, je marche pour la première fois dans la rue principale de cette ville, décorations florales magnifiques sur les trottoirs ; je suis émerveillée. Que l’on mette tant de jardinières ornées avec goût, c’est inhabituel ! Devant le Grand Hôtel également tout est planté, assortiment des couleurs, délicatesse des fleurs.
Alors, selon ma bonne ou mauvaise habitude, j’ai écrit à Monsieur le Maire pour le complimenter, pour lui dire que sa ville était un joyau.... J’ai eu une gentille réponse, et depuis, je reçois tous les mois, la revue de Cabourg avec les compliments de Mr le Maire.
Voila, à défaut de fleurs dans la rue La Quintinie, je regarde les fleurs en Normandie.J'aurais apprécié une invitation au Grand Hôtel, Petit Déjeuner sur la terrasse, en compagnie de Marcel Proust et de quelques madeleines...faut pas rêver, Danielle...
Paris, le 20 Novembre 2010