LE VOYAGE A MADRID, sur une aile de papillon !
En Mai 1988, je suis seule à Paris.
Au bureau, au bout du couloir est installé le Service de la Jeunesse. Dans ce Service travaille une charmante jeune femme Monique Boisard ; c’est une Conseillère Technique et Pédagogique en Expression Plastique. Elle encadre de nombreux stages et parfois accompagne des groupes d’associations pour les guider lors de voyages pédagogiques. Elle travaille en équipe, avec Christian Audjan, Conseiller Technique et Pédagogique.
Monique a programmé un voyage touristique à Madrid.
Elle me suggère : pourquoi ne pas venir avec moi, ce serait formidable et si tu veux on pourrait partager la même chambre.
Je ne connais pas Madrid et je pense que la découverte d’une belle ville, encadrée par une personne de qualité, que j’apprécie beaucoup, très érudite, délicate, ne peut être qu’un plus pour moi. Je ne pensais pas si bien dire.
Je fais rapidement connaissance avec les participants et Christian.
Voyage, installation à l’hôtel et le charme commence. Nous visitons la ville selon un programme bien établi, Monique ne laisse aucune part au hasard.
La nouveauté de ce voyage est un « petit plus » très original. Devant les Monuments, Monique nous décrit l’architecture et Christian nous lit un passage de littérature se rapportant à cet édifice. Je vis des instants exceptionnels.
Le soir, nous passons dans des tavernes bruyantes et joyeuses, pour déguster des tapas. Après dîner, dans notre chambre, je me moque gentiment de Monique qui révise consciencieusement le programme du lendemain : »mais enfin Monique, tu sais tout par cœur, repose-toi un peu ». C’est beau la conscience professionnelle et chez Monique, ça prend des proportions. Assise en tailleur sur son lit, des bouquins partout, elle s’entoure de livres de littérature, de revues de peintures, de guides, je ne peux pas l’aider, beaucoup, trop savante pour moi.
Le lendemain, visite du Musée du Prado. C’est magnifique. Monique commente les tableaux, "les Menines" bien sur (qui a longtemps trôné dans la chambre de Pascale), explique la peinture de Velasquez, je n’en crois pas mes yeux ; j’ai lu « admirer un Velasquez ou un Rembrandt dans un endroit comme le Musée du Prado de Madrid est une expérience unique ». Et je le confirme. Les tableaux sont d’une très grande beauté et Monique nous les explique à force de détails, qui nous font percevoir ces peintures différemment. Tout à coup, je suis attirée par un tableau représentant un intérieur cossu. Mobilier, lampes, vaisselle, tout est précieux. Un tapis magnifique, recouvre la pièce. Je ne peux détacher mon regard de ce tapis et juste devant, sans m’en apercevoir, je vais tendre la main pour toucher cette matière qui me parait si douce, l’épaisseur et le velouté de la laine. Heureusement, in extrémis, quelqu’un arrête mon bras pour éviter le sifflet du Gardien.
Aujourd’hui encore, je me demande comment ai-je pu ne pas m’apercevoir de l’illusion et qui a arrêté mon bras ? Monique, je suppose, véritable ange gardien.
En sortant, nous passons à l’annexe pour contempler « Guernica » de Picasso. Ce tableau est immense, protégé de façon impressionnante ; derrière sa vitre blindée, on est un peu loin pour voir les détails. Mais nous écouterons l’histoire et l’analyse du tableau, le chaos du bombardement du 26 avril 1937.
Il fait un temps magnifique, on se ballade sur la Promenade des Recoletos, on admire la Fontaine Neptune, Cibeles. Arrêt, pour permettre à Christian de nous lire quelques pages.
La Puerta Del Sol où nous déjeunons sur une belle terrasse. Le groupe est joyeux et Monique se risque à déguster un verre de vin. « Attention Monique, tu vas oublier ta prestation prochaine... ». J’ai mon succès, on rit parce que nous connaissons tous son professionnalisme sans faille.
Le soir à l’Hôtel, on recommence les révisions et avant de se coucher Monique bichonne ses chaussures de marche en cuir ; elle frotte, frotte, les fait briller. Tu comprends, me dit-elle, c’est mon outil de travail, il faut que je sois à l’aise sinon c’est fichu, ma journée est gâchée.
Evidemment, bien sur Monique, tu as encore raison.
Le lendemain, promenade dans le vieux Madrid. Nous croisons un groupe d’Etudiants qui se baladent, guitares, et longues capes noires, en chantant. Nos guides préférés nous expliquent qu’ils chantent « La Tuna », musique traditionnelle d’Espagne chantée par des jeunes Universitaires faluchés et encapés, qui n’ont qu’un seul but : séduire les jeunes demoiselles. (Clavelito est une mélodie espagnole récitée par la Tuna). Nous les entourons, c’est très agréable de les entendre et nous les suivons un moment.
« Allons Mesdemoiselles, soyez généreuses envers ces beaux garçons qui roucoulent sous vos fenêtres».
Il y eut beaucoup d’autres visites, un déplacement en Métro qui nous valut des petits problèmes, plutôt amusants avec le recul.
Et là, surprise, rencontre avec une amie de Monique, elle marche avec nous et nous invite, Monique et moi, chez elle. Je garde le souvenir d’une jolie maison chaleureuse.
Voilà, après d’autres ballades, des restaurants typiques, des monuments, il fallut songer au retour.
De beaux souvenirs pleins la tête, promesse de se revoir, pour d’autres voyages peut-être ; pour Monique et moi, facile, un couloir nous sépare....
Madrid, Mai 1988
Paris, Juin 2010
Danielle Darmon
Un merci en forme de clin d’œil à toi, Monique, pour ta gentillesse, ta compétence, ton charme qui a rendu ce voyage inoubliable ; et en souvenir de nos fous rires et notre complicité dans la chambre.
Gracias querida Monique