Avertissement : tous les évènements décrits ci-dessous sont vrais ; je les ai vécus, j’ai eu peur, j’ai été chagrinée. Aujourd’hui, en me rappelant ces épisodes exceptionnels de ma vie, j’en ris, mais reste au fond de moi, encore, un peu d’émotion.... après tant de temps.
Après avoir vécu tout près de la maison, des vacances souvent ensemble, Trouville, Cabourg, des pâtés de sable magnifiques abattus d’un coup de pelle, des mouettes aux ailes majestueuses, des poneys, mes petits-enfants, Jordan et Anthony quittent Paris à l’âge de 10 ans et 7 ans, pour habiter à CAEN.
Nous allons souvent leur rendre visite pour se voir, pour se donner des nouvelles.
Ce jour là, j’appelle les enfants :
« Alors les chéris, comment allez-vous ?
- on va super bien, vous arrivez à quelle heure ?
- vers 16 heures environ,
- ah ! super, je te préviens mamy, il y a une surprise à la maison !
- Moi (naïve) une surprise pour moi ?
- Si tu veux, elle peut être pour toi (petit gloussement),
- C’est quoi exactement, un appareil à raclette ? (ils sont gourmands), un jeu de société ? console de jeu Wii ?
- Non, non, mamy tu as tout faux !
- Bon alors ça suffit, vous êtes fatigants avec vos cachotteries, je donne ma langue au chat !
Et là, des hurlements de joie, ah, ah, rappelles-toi bien de ce que tu viens de dire, quand tu seras à la maison, je mettrai la petite chatte sur tes genoux et tu lui donneras ta langue.
Je suis mal, ils sont devenus fous, j’ai une peur bleue des chats, je suis effondrée, vous ne m’avez pas fait ce coup là, week-end foutu, ça va être l’enfer.....
C’est reparti, les enfants n’arrêtent pas de rire, « je vous préviens, vous avez intérêt à l’attacher ! Je ne veux pas qu’elle me frôle » !
Ce à quoi ils rétorquent d’un air supérieur, un chat c’est pas pareil qu’un chien, un chat c’est indépendant, on ne lui met pas de laisse, allez mamy, ne crains rien, quand tu la verras tu vas lui faire des bisous sans arrêt, tu vas fondre comme un glaçon.
Insupportables garçons ! Fini la détente !
Arrivés à Caen, à Louvigny plus exactement où ils habitent, on klaxonne afin qu’ils viennent nous aider à décharger la voiture, je rentre dans la maison à reculons, jette un regard circulaire craignant de voir surgir la bête
Et tout à coup le félin s’avance, démarche souple et nonchalante ; sur toute l’assemblée, il me choisit, pitié, pourquoi moi ?
Les enfants font les présentations, Coquette je te présente mamy, elle adore les chats, vient mamy, vient la caresser, fait comme moi et il couvre son petit museau de baisers saccadés.
S’en est trop, je dis à Anthony : les microbes ! tu y as pensé aux microbes ! mais enfin garde ça pour les filles, tu veux t’exercer ou quoi ????
Il ne m’entend pas, l’histoire des filles ça ne percute pas, il continue de plus belle à embrasser la demoiselle, il sort la panoplie des mots doux, ma belle, mon amour, je t’aimerai toute ma vie, je n’en crois pas mes oreilles....
C’est l’heure du dîner, celui de la Reine de la Maison, de Coquette.
Un emplacement réservé, une nappe brodée, et des croquettes aromatisées aux légumes, un petit bol d’eau fraiche et chatounette est servie !
Ça croque et ça re-croque ; je suis stupéfaite devant l’appétit de ce Chat ; a peine son repas terminé, elle saute sur notre table ! Un bon dessert, peut être ? Appelez moi « le garçon »..... On lui passe tout, on fait semblant de la gronder Oh ! Là, là, là et j’assiste aux « Caprices de Coquette », elle part d’un coté pour revenir d’un autre.
La maison est bordée de 2 jardins ; la Miss fait un petit tour et selon un scénario bien rôdé, elle disparaît jusqu’en fin de soirée, elle saute avec une agilité extrême, et retombe grâce à ses petits coussinets, en douceur ; elle chasse, va retrouver les copains, s’amuse, il faut bien que jeunesse se passe....
Et moi, enfin, j’ai un peu de répit, je me détends presque instantanément en oubliant les félins et leurs descendances.
Pas folle la petite, à l’heure du coucher, Coquette réapparaît, je suis sure que si elle savait parler elle dirait : « comment c’est pas prêt, j’attends, dépêchez-vous, je suis là, j’ai faim pour un petit En-cas » Où comment une petite chatte fait la loi à la maison.
Au moment du coucher, j’interroge, comment faire si je la rencontre dans la nuit, c’est ma hantise. Les enfants me font la leçon : quand tu rentres dans ta chambre, tu fermes bien la porte en relevant la poignée, tu ne risques rien, elle dort dans le living.
Ouf, je suis tranquille, « un peu de finesse dans un monde de brutes ».
Nuit tranquille, c’est beaucoup dire ; vers 2 h du matin j’entends un bruit terrible, la porte tremble avec une force incroyable, silence et ça repart puis la porte s’ouvre en grand, dans le noir on ne voit rien. Je suis affolée, les enfants arrivent en pleurant de rire, ne t’inquiète pas on va la faire sortir !
Alors branle-bas de combat, on cherche l’insupportable chatte et, maligne, elle s’est réfugiée sous le lit, juste au milieu ; on éclaire tout, on appelle, viens voir ton maître , on tape des mains, on fait tout ce qu’il ne faut pas faire, c’est-à-dire du bruit. Elle est effrayée, et ne bouge plus. Tout ça n’arrange pas mes affaires, j’ai travaillé tôt le matin, petites galettes pour les enfants, rôti, bagages, 3h de route et toutes ces émotions en arrivant ; la fatigue se fait ressentir, je pense à la boite de croquettes, on agite, coucou ! Ce soir c’est gala un repas supplémentaire et j’obtiens « cause toujours tu m’intéresses » c’est à dire rien. Là je baisse les bras, je les laisse tous dans la chambre et je vais m’étendre sur le canapé « en jurant, mais un peu tard, qu’on ne m’y prendra plus ». Je commence à peine à somnoler quand j’entends des cris de joie : on l’a eu, mamy, on l’a attrapé avec son jouet.
Bravo, si vous croyez que c’est comme ça que vous allez dresser un chat (moi l’experte, je donne des leçons). Enfin, ils ont réussi à attirer Coquette à l’aide d’une laisse avec des grelots au bout, elle s’est hasardée à sortir du dessous du lit, pour avancer la pate, ils ont tiré doucement, gestes très calmes et précis, sans bruit et hop on l’attrape !!
Bravo les enfants, vous allez être en forme pour l’école demain.
Voilà une soirée mémorable que je n’ai pas oubliée après tout ce temps.
Le fin mot de l’histoire est que Coquette avait un savoir faire particulier pour ouvrir les portes, elle se recule assez loin, prend son élan et saute avec une précision étonnante sur la poignée qui cède évidemment.
Jordan et Anthony se sont rapidement endormis non sans avoir discuté âprement pour savoir qui allait prendre la Chatte dans son lit....Je renonce !
A l’occasion d’un autre voyage, on peut dire, je me suis légèrement habituée à la petite.
Quelques jours plus tard, on gronde Anthony, le plus jeune, pour une raison insignifiante que j’ai totalement oubliée. Quand Anthony pleure, il faut le savoir, vous devez sortir la barque du hangar, on risque de se noyer ; ses larmes sont très grosses, à peines essuyées il en coule d’autres. Je ne peux pas voir ça, je console, arrête de pleurer, tu es un grand garçon, accompagne-moi, je vais au supermarché, tu me guideras dans les rayons. Bizarre !! Il me semble que les larmes s’arrêtent un peu vite, tant mieux! Arrivés au Magasin les larmes reprennent, je n’y comprends plus rien, allons chéri dis-moi ce qui ne va pas, pensant qu’il allait me confier un secret ou plutôt me demander de lui acheter un paquet de bonbons.
Et enfin j’ai la clé du mystère ; entre deux hoquets il m’avoue : tu aimerais, toi, manger tous les jours la même chose ? J’écarquille les yeux, j’étais sure, je pense qu'il va me demander de cuisiner un bœuf bourguignon ; Pas du tout !! Il me dit voilà, j’ai pas d’argent pour lui acheter le pâté qu’elle adore, si tu voyais comme elle se lèche les babines !!
(Ouf ! ce n’est que ça !) Nous allons voir le rayon en question, je n’ai jamais fait attention à un tel assortiment de repas pour chats et chiens. Anthony cherche parmi les boites, hésite, qu’en penses-tu mamy (je sens que je vais avoir un avis très éclairé) je prends celle-ci ou cette boite, Wiskis ou Félix, il me fait pitié ce garçon que j’adore, drame cornélien, je fais mine d’hésiter un peu puis, allez prend les deux.
Il s’exclame , OH! Merci mamy ! Je t’adore, baisers sur les 2 joues comme s’il ne savait pas, je n’ai jamais su dire non, je n’ai jamais rien refusé aux enfants.
A partir de ce jour, bizarre, les garçons m’ont volontiers accompagné au supermarché. On a étendu nos achats à d’autres croquettes, à des pâtés divers, à des litières.....
Remarquez, le spectacle vaut le déplacement. Quand nous rentrons des courses, ils sont d’une rapidité extrême, il ouvre la boite, écrasent à la fourchette et appelle Coquette :
« Viens voir ma beauté on t’a fait une surprise ! Ils s’allongent à plat ventre, la bouche à la hauteur de l’assiette, hum, comme c’est bon mon amour, je t’aime, tu es la plus belle des chattes, la plus gentille, la plus mignonne..... Je n’arrive pas à m’y faire à tous ces mots doux pour un chat : « Vous ne croyez pas que vous devriez garder ce vocabulaire pour les filles ??
Je ne sais pas pourquoi je fais une fixation sur les filles ? Et les enfants ne savent même pas la signification du mot fille ....
Et enfin, parmi les souvenirs les plus difficiles, un soir on attend Coquette pour le diner, elle n’arrive pas, on prend notre repas, d' un air détaché, les garçons sont inquiets, ils font des allers-retours au jardin, la boite de croquettes en main, c’est le tam-tam de la brousse, rien n’y fait ; alors ils sortent le grand jeu : « ma chérie, tu as oublié, aujourd’hui c’est le jour de ton pâté, celui que tu aimes.....
Je me détourne prise d’un fou rire, nerveux, mais très inquiète malgré tout. On discute, elle doit avoir un amoureux, on la reverra demain ! Elle a perdu son chemin ? Là les enfants se fâchent, les chats ont un flair supérieur au notre !! (Tais-toi Danielle, tais-toi). L’heure avance, il est minuit, les enfants sont en pyjama dans le jardin humide, du coup j’interviens, je m'énerve, c’est de la folie, je leur lance un anorak, je vois les larmes d’Anthony perler au bord des paupières. Chacun y va de sa méthode et moi je dis « mais faites moins de bruit, les voisins dorment ! Personne ne m’écoute, je suis épuisée et peinée pour les enfants, ils ne veulent pas se coucher.
Alors, moi qui ne voulait pas approcher la chatte, je vais avoir ces paroles étonnantes : « je vais m’allonger un moment, si par hasard elle revenait, venez me le dire, même si je dors, vous me réveillez, je dormirai beaucoup mieux après ».
Je suis chagrinée pour les enfants, je jure de me venger de ce matou, faire de la peine aux garçons, et tout à coup me vient en mémoire la Pouponnette de Pagnol, la femme du Boulanger :
« Ah te voilà, ordure, salope, c’est maintenant que tu reviens. Et le pauvre Pompon, il s’est fait un " mauvais sang d’encre pendant ces 3 jours, plus malheureux qu’une pierre. Et elle, pendant ce
" temps là, avec son chat de gouttière, un inconnu, un bon à rien ..... »
Raimu - Ginette Leclerc (GOOGLE)
Je ne sais pas si c’est l’effort de mémoire, je m’endors paisiblement. Et bout d’un moment, un enfant vient chuchoter à mon oreille : « elle est rentrée, elle mange.... «
Ses émotions ne sont plus de mon âge.... comme dirait une personne de ma connaissance.
Heureusement, il y eut des bons moments, des leçons de chat pour apprendre les bases indispensables.
L’animal blotti sur les genoux, se laissant caresser, serait un anti-stress naturel, ils ont un grand intérêt pour le jeu et « la liberté n’a pas de prix » on en sait quelque chose !
Et puis un jour, j’étais à Paris, Tél. « on ne trouve plus Coquette ». Heureusement que je ne suis pas avec les enfants, tous nos coups de fil tournent autour d’elle. Ils mettent tout en œuvre, affichettes sur les troncs d’arbres, ils courent chez le Vétérinaire, on ne vous aurez pas ramené.... ils expliquent aux voisins, le temps passe, je me dis c’est fichu ! 1 mois, 2 mois s’écoulent et tout à coup sur notre jardin intérieur, je vois ...Coquette ; grande émotion, je suis mal, mais c’est impossible, elle s’est faufilée dans le coffre, comment a-t-elle pu voyager ? j'entends les cris de joie des garçons !
Je consulte la gardienne et lui demande : a qui est ce chat, Oh ! C’est le chat de Mr.... il est souvent dans le jardin.
Et voilà comment j’ai perdu espoir de retrouver Coquette pour faire cette surprise aux enfants. A Louvigny, également, avec le temps, tout doucement, la chatte est sortie des mémoires. J’espère, ça va leur servir de leçon, plus de chat, c’est trop difficile !
Une ou deux années s’écoulent, au printemps, les fleurs réapparaissent,
les arbres ont de nouveau des feuilles, le coup de fil, Anthony me déclare, on va avoir un chat !!! l’amie de maman veut bien nous donner un petit chat de la portée qui va naître. Je manque m’étouffer, mais c’est incroyable les garçons ont la mémoire courte, ils attendent la naissance des chatons (Apparemment ils ont déjà été rendre visite à la mère pour voir à quoi ressembleront les chatons, c’est pas possible, ils ont vraiment tout oublié).
Mais problème ! Les parents ne sont pas chauds, ils faut les persuader.....
Une fête se présente, nous allons à Caen, et pour convaincre les parents, j’écris des vœux d’anniversaire en forme de
« Supplique pour un chat »
Ils l’ont appelé « BIJOU »
Elle s'intéresse à l'Art !
Elle va bien, merci !!
Paris /Caen le 22 Janvier 2011
Pour Jordan et Anthony
aujourd'hui 21 et 18 ans
Avec toute l'affection de leur Mamy miniature.
Danielle DARMON